“œuvre ne consistant qu’en son acte d’achat/vente”

Ghislain-&-I

(À Gauche JaZoN Frings, À Droite Ghislain Mollet-Viéville)

Entretien : Ghislain Mollet-Viéville, JaZoN Frings, Romain Gandolphe et Kevin Caro 

Ghislain Mollet-Viéville : J’ai pris l’initiative d’envoyer plusieurs chèques à des artistes dans le but de leur acheter une œuvre ne consistant qu’en l’acte de son achat (sans objet d’art, sans contrepartie d’aucune sorte et ne donnant pas lieu à un certificat).

 

Question : Comment déterminer véritablement l’auteur des œuvres dont vous êtes à l’origine ?

GMV : L’art est un état d’esprit et ces œuvres m’ont été insufflées par la démarche des artistes à qui j’ai fait cette proposition d’achat. Ces artistes en ont été les inspirateurs à travers les propos que j’ai pu échanger avec eux et à partir de ce que j’ai compris de leur réflexion.

Chaque œuvre est indissociable du contexte qui la fît émerger et ce sont les artistes qui lui ont donné (et lui donneront à travers la communication qu’ils pourront en faire) son sens et sa véritable légitimité. Chacun des chèques que j’ai donné pour ces acquisitions fonctionnent sur le même principe de départ mais, sur le fond, elles sont toutes différentes dans mon esprit car elles sont reliées au travail de chacun des artistes.

 

Question : Dans votre collection, avez-vous d’autres œuvres qui viennent en alternative au système socio-économique du marché de l’art?

GMV : J’ai deux petites toiles monochromes de Bobig (artiste) qui m’a payé pour que je les expose chez moi en permanence (dans ma bibliothèque). J’ai un Service de Jean-Baptiste Farkas (IKHÉA©SERVICES) pour lequel j’ai rayé que j’en étais propriétaire dans son “certificat” (cette œuvre reste la propriété de Jean-Baptiste à qui j’ai demandé de la revendre à d’autres collectionneurs à la condition qu’ils acceptent qu’elle passe de main en main sans jamais appartenir à personne), J’ai acheté une action de la bourse de valeurs créées par JaZoN etc… D’une façon générale ma collection d’art s’établit à partir de mes relations aux autres et comporte toutes les propositions/actions dans lesquelles je m’engage. Cet ensemble d’œuvres constitue la métaforme d’un art qui ne m’intéresse plus quand il produit des formes matérielles. Je privilégie le vécu en art : un certain art de vivre… l’art.

 

Question : Font-elles désormais partie de votre collection ?

GMV : Ces œuvres sont maintenant dans ma collection sous la forme de leur acte d’achat/vente qui a bien eu lieu puisque les chèques ont été débités sur mon compte bancaire. Je les expose à travers les commentaires oraux (parfois écrits) que j’ai avec mes interlocuteurs à leur sujet. Ce sont des œuvres qui contribuent à me faire repenser mon statut de collectionneur présentant sa collection.

 

Question : Comment peut-on les localiser ?

GMV : D’abord elles existent dans la connaissance que nous en avons et que nous pouvons transmettre. Ensuite, ce sont des œuvres qui se révèlent à chaque fois que quelqu’un les évoquera. Ces œuvres ont pour but essentiel de socialiser l’art.

Parler de ces œuvres et y penser les enrichit des réflexions qu’elles entrainent sans en changer la nature fondamentale qui ne consiste au départ qu’en leur seul acte d’achat par moi.